Salon de Genève 2015 l'attaque des clones
Dans leur course aux économies d'échelle, les constructeurs ont rivalisé d'ingéniosité, quitte à ce que leurs modèles se muent en une armée de clones. Il n'est pas étonnant, alors, que la personnalisation soit désormais au cœur de leurs arguments de vente.
La bonne santé des modèles sportifs et le frétillement indéniable de la flamme de la passion alors que l'on croyait ses braises éteintes par le souffle glacial de la crise ne doivent pas faire oublier que la tendance de fond de l'industrie automobile est la standardisation des modèles. Et, à en croire les signaux que nous envoie Genève, ce n'est pas près de s'arrêter. Les nouvelles technologies ont pris leur temps avant de prendre place dans nos habitacles. Mais maintenant qu'elles s'y sont installées, rien ne semble pouvoir arrêter leur déploiement.
Que ce soit à l'intérieur des voitures, ou sous leur capot, le monde de l'automobile s'en sert désormais massivement pour réaliser d'importantes économies d'échelle. La politique du groupe Volkswagen (qui débarque à Genève avec sa nouvelle Golf VII GTF et son Audi A3 e-Tron, hybrides rechargeables construites autour de la même plateforme) témoigne de la vigueur de cette pratique.
La tendance est à la stratégie multimarques. Pensez : Skoda, Seat, Audi, Porsche, Bentley, Lamborghini et Bugatti appartiennent au groupe Volkswagen ; Abarth, Alfa Romeo, Chrysler, Dodge, Ferrari, Jeep, Lancia et Maserati au groupe Fiat ; Rolls-Royce et Mini à BMW ; Smart à Mercedes ; Kia à Hyundai ; Lexus à Toyota ; Renault, Nissan (lnfinity) et Dacia sont comme des frères ; Jaguar et Land Rover sont sous le pavillon indien Tata ; sans oublier la nouvelle aventure entre Peugeot-Citroën et le Chinois Dongfeng. Une quarantaine de marques de premier plan sont concentrées autour d'une petite dizaine de groupes. Quitte à ce que cette politique entraîne la production de clones (mêmes moteurs, mêmes technologies, même plateforme...) uniquement différenciables par leur badge.
Les deux faces d'une même médaille
Or la crise qu'a traversée l'industrie automobile, et dont les séquelles sont encore bien sensibles, a montré que les usagers portaient de plus en plus leur choix sur des modèles offrant des possibilités de personnalisation poussées. Une donnée indéniable qui semble en parfaite contradiction avec la stratégie globale des grands groupes. Mais c'est oublier un peu vite leur grande capacité d'adaptation. Là encore, la technologie jouera un rôle fondamental. Plus leur offre se standardise, plus leurs modèles sont customisables, en apparence du moins.
Et Genève le montre bien. Toyota, pour conserver son trône de premier constructeur mondial, peaufine un concept détonnant, le Fun Vii (photo), qui offre la possibilité à son propriétaire de « customiser » entièrement l'intérieur de son véhicule. À la manière d'un fond d'écran d'ordinateur, l'habitacle et la carrosserie, par un ingénieux système d'écrans et de LED, afficheront les couleurs choisies par le conducteur ou même des photos de ses dernières vacances.
Et le géant nippon n'est pas le seul à miser beaucoup sur cette tendance qui va s'intensifier au fil des années à venir. Citroën, avec sa DS qui propose de multiples combinaisons de couleurs, a déjà fait un premier pas dans ce sens (la 055, se refait une petite beauté à Genève). General Motors, Fiat et BMW ont également beaucoup investi dans cette direction. La dernière Mini et ses innombrables coloris, ou encore la triplette Toyota Aygo, Citroën Cl, Peugeot 108, montrent ainsi qu'à la standardisation des productions répond l'individualisation des offres.
La disparition du conducteur
Le stade ultime de ces deux tendances devrait être l'automatisation de la conduite, qui devient de salon en salon une réalité de plus en plus proche. Grâce à des constructeurs comme Volvo ou des géants comme Google ou Bosch, la voiture de demain prendra en charge la plupart des phases de conduite, si ce n'est toutes. Aides à l'insertion aux intersections, développement des assistances au parking, gestion des ralentissements à venir (Honda présente un système révolutionnaire qui prévoit les bouchons et gère l'allure du véhicule pour mieux les éviter).., le conducteur aura de moins en moins de choses à gérer.
Jusqu'à ne plus rien gérer du tout : les véhicules autonomes sont déjà prêts. Ce tournant important de l'automobile devrait faire accomplir un grand pas à la sécurité. Volvo a d'ailleurs fait un pari : qu'il n'y ait plus aucun mort dans un modèle du constructeur suédois d'ici à 2020. Cela passera par l'automobile ultra-connectée. Les véhicules communiqueront entre eux (via le système Car2x de Bosch, par exemple) pour s'informer de leur présence et des dangers potentiels. Ils communiqueront aussi avec le réseau des réseaux pour obtenir des renseignements sur l'état des routes ou encore du trafic et régler leur comportement en fonction des informations reçues (sans même que le conducteur n'ait à intervenir).
Une hyperconnectivité qui offrira également tout un lot de divertissements aux passagers (réseaux sociaux, diffusion multimédia, jeux vidéos...). Mercedes, Audi, BMW, Renault et Audi, entre autres, via Genève, nous donnent rendez-vous avant 2020 pour nous proposer des voitures qui se passeront entièrement de nous.